Tributes to Paul Pontallier

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I took a break from tasting 2015 bordeaux to attend Paul Pontallier’s funeral mass last Saturday morning in the sepulchral Basilique St-Seurin in the heart of Bordeaux. 

Paul’s spirit and great achievements were very much in evidence and those who faced the swollen crowd to describe what Paul meant to them included his very brave and gracious widow Béatrice, his children Guillaume, Thibault, Alice and Antoine, his employer and collaboratrice Corinne Mentzelopoulos of Château Margaux, an entity that was acknowledged almost as human in all speeches, and two of his three partners in the Chilean wine company Viña Aquitania: Bruno Prats (ex Ch Cos d’Estournel) and Ghislain de Montgolfier (ex Bollinger). The third partner, Felipe de Solminihac, busy with the 2016 vintage, was organising a mass held in his memory in the Chilean capital Santiago. 

It was a hugely affecting occasion that underlined just what an extraordinary person Paul was. Just some of the massive crowd outside the church are shown in my amateur picture below.

Below are the speeches given by Corinne and by his second son Thibault, vintage 1986, who represents Ch Margaux in Asia (Guillaume, vintage 1983, is a cyber security specialist about to move to New York having set up his own sizeable company). We were very touched, incidentally, to see not only Corinne but both Thibault and Guillaume, all shell shocked, when we went to Ch Margaux to taste their hugely successful 2015s.

Most of these speeches are in impeccable French that should not be too difficult to understand, although Thibault offered his own brief English translation, as well as his perfect rendition of his father’s English accent in this speech:

Mon petit Papa,

Il y a tant de monde et tant de soleil aujourd’hui pour te rendre hommage, pour célébrer ta vie et célébrer tant d’amour. Je remercie le Seigneur de nous donner une si belle journée et une si belle lumière, car je n’ai jamais vu le moindre petit nuage sur ton si joli sourire. Tu as toujours été une lumière magnifique pour nous, qui vivra dans nos cœurs et nous guidera pour l éternité.

Merci de m'avoir attendu pour un dernier au revoir. Je suis arrivé le week-end dernier de Hong Kong, j’ai pu te voir le samedi, nous avons pu plaisanter ensemble, nous dire que nous nous aimions et qu’après tout, c’était la seule chose qui comptait.

Et puis tu es parti dans nos bras le lendemain dimanche 27 Mars, jour de Pâques, symbole de la résurrection, une heure seulement après notre si belle rencontre avec le père Francis qui nous aide tant aujourd’hui et que nous remercions du fond du coeur. Il me rappelle ton sourire, ta chaleur, ton amour des gens et de la vie. Ça fait beaucoup de bien.

Aujourd’hui nous perdons notre Papa, mais je perds aussi mon meilleur ami, mon confident, mon mentor, mon patron, mon compagnon de voyage, mon voisin de table, un si grand cœur, une si grande chaleur. Qu’il fait froid sans toi Papa.

Tu m’avais toujours dit que le plus bel amour sur Terre était celui d’un parent pour un enfant, cet amour si pur, si infini et si inconditionnel, et que tu n’aurais jamais accepté de voir l’un de tes enfants souffrir. Je dois te dire que ces derniers mois, en te voyant souffrir sur ton lit d'hôpital, j’ai ressenti tellement d’amour et de peine que je voulais prendre tes douleurs, et souffrir à ta place pour que tu puisses rester plus longtemps avec nous. Ce sentiment d’amour est tellement intense, si beau, si profond… Je te remercie de m'avoir fait comprendre le sens réel de la vie et de l’amour à l’heure de ton départ. C’est sans doute cela devenir adulte.

Toi qui comparais toujours les grands vins aux grands hommes, tu étais comme un grand verre de Château Margaux. D’abord un charme fou, un si beau sourire et ces yeux bleus si doux, si pénétrants, auxquels personne ne pouvait résister. Mais ensuite, ceux qui te connaissent savent bien à quel point une telle élégance cachait une véritable puissance et une réelle profondeur d’esprit, un amour et un partage infinis, tout en finesse et avec quelle fraicheur, comme la finale gracieuse et éternelle d’un grand millésime.

‘La puissance ne doit venir qu’après le charme et l’élégance,’ tu aimais répéter en parlant des vins, mais nous savions tous que tu parlais aussi du type d’hommes et de femmes que tu appréciais dans la vie.

Tu aimais comparer les millésimes à tes enfants, en disant qu’ils avaient tous une personnalité unique et différente, et qu’il était donc impossible d’en choisir un seul. Il me semble que tu aurais pu avoir 80 enfants et tous les aimer de la même façon si unique et si profonde, et être aimé d’eux en retour avec la même intensité que nous quatre aujourd’hui, comme tous les vins que tu as pu faire et gouter dans ta vie.

Beaucoup de journalistes te décrivent cette semaine dans leurs articles comme un grand scientifique, un grand vigneron, un philosophe du vin, mais à nos yeux tu étais tellement plus, tu étais un grand Homme, si cultivé, un gentleman hors normes, un artiste, un grand humaniste, toi qui aimais tant Mozart, Paul Valery, Beethoven, Boris Vian, Montaigne ou encore Verdi.

Nous aimions parfois nous moquer de toi, de ton optimisme légendaire, de ta faconde et de ton accent tellement ‘British’. Tout pour toi dans la vie était ‘so maarvelous, so subtle, refined, delicate, flabbergasting’. Où donc dans ta vie as-tu pu apprendre cet accent anglais si parfait Papa? Ce secret partira avec toi.

Nous avions aussi l’impression que nous pouvions appuyer sur un bouton près de toi et que tu aurais pu te mettre à parler durant des heures de n’importe quel sujet: la chute de l’empire Romain, l’œuvre de Bach, les déboires de la quatrième République, l’histoire de la civilisation Japonaise… Aucun sujet ne semblait avoir de secrets pour toi.

Tu ne nous as jamais mis de pression Papa, tu voulais qu’on fasse ce qu’on aime, qu’on élargisse au maximum notre ‘univers des possibles’ comme tu aimais le dire, qu’on suive notre passion, et je t’aimais sans doute tellement qu’au final j’ai voulu travailler avec toi depuis sept ans.

Quelle chance avons nous eue de travailler ensemble ces dernières années, combien de souvenirs formidables avons nous pu partager à Hong Kong, en Chine, en Inde avec Alexandra, en Indonésie, à Singapour, à Seoul, à Tokyo, mais aussi à Fukushima pour ce si beau et si émouvant diner de charité après cette catastrophe qui t’avait tant émue… la liste est longue et les images sont si belles dans ma mémoire, j’y penserai souvent et je sourirai en buvant un verre à ta sante au Paradis. Cent fois nous aurions pu avoir deux chambres à part dans ces beaux hôtels à l étranger, mais toujours nous voulions prendre une chambre avec deux petits lits pour être ensemble au maximum. Quel bonheur…

Tu disais souvent ‘les plus grands vins sont comme les grands hommes, ce sont les plus abordables, ils ne se prennent jamais au sérieux, ils sont tout en délicatesse, en finesse et en simplicité’. Papa c’est sans doute la plus belle et la plus importante leçon que tu m as apprise dans la vie, de ne pas prendre les choses et de ne pas se prendre soi même trop au sérieux. Tout ce qui compte c’est l’amour, le reste est si futile, c’est ce que nous disions encore sur ton lit d’hôpital, et tu nous rappelles aujourd’hui à quel point la vie passe vite.

Au delà de la rapidité atroce et si injuste de ton départ, j’avoue ne pas regretter grand chose, car tu as su nous donner tant d amour, notre relation était si fusionnelle que nous avons toujours su tout nous dire en quelques secondes, nous comprendre en un regard, nous dire que nous nous aimions sans la moindre gêne ou timidité, nous prendre dans les bras dix fois par jour, et cela nous comblait de joie plus que les mots ne peuvent le décrire.

Mon seul regret est de louper ces 30 prochaines années avec toi Papa, nous avions tant de beaux projets à faire encore ensemble. Je voyais bien que nous t’offrions une seconde jeunesse et tant de choses encore à découvrir. Nous savions que ton prochain rêve était de devenir grandpère, toi qui aimais tant les enfants, tu souhaitais autant de petits enfants que possible. Excuse nous avec Guillaume d’avoir pris notre temps… Tu me disais encore samedi dernier à quel point tu aimerais ne plus être sur ton lit d'hôpital mais assis dans l’herbe avec tes petits enfants courant autour de toi. Cette dernière phrase résume tellement bien qui tu es, ton amour et ta simplicité, car la vie n'a jamais été compliquée pour toi, elle était seulement faite de ces petits bonheurs simples et intenses.

Je répète souvent cette phrase lors des diners pour Château Margaux, que tu m'avais dite lorsque j’avais 10 ans. Je te demandais quelle était la différence entre un bon vin et un grand vin. Tu me disais ‘un bon vin donne du plaisir, un grand vin donne de l'émotion’. Sois certain, Papa, que tu as su nous donner les deux durant toute ta vie.

Si un seul mot devait résumer qui tu étais, c'est l’AMOUR. Tu avais cette force de vie incroyable, si chaude, si contagieuse et si positive, cette force d'amour et cette gentillesse que tu as su donner autour de toi, à tous les gens qui ont croisé ton chemin.

Nous avons reçu cette semaine des centaines de messages du monde entier, et tous nous disaient à quel point ils avaient été touchés par ta personne et s’en souvenaient encore, même ceux qui t’avaient rencontré un court instant. Tu savais donner a tout le monde le sentiment d'être important. Tu aimais les gens plus que leur titre ou leur fonction.

Nous souhaitons dire un immense merci à Corinne Mentzelopoulos ainsi qu’à sa famille, qui a tant entouré Papa ces derniers mois, et à toute l’équipe de Château Margaux qui est présente aujourd’hui. Merci pour ce bel hommage, vous êtes formidables, mon père serait tellement content de tous vous voir. Il aimait tellement cet endroit qui nous est devenu si familier depuis plus de 30 ans, c'était sa seconde maison et sa seconde famille. Il décrivait toujours avec une si belle émotion le vignoble, cette si belle allée qui mène au château, l’odeur des chais, la couleur des raisins, les sons joyeux venant de la tonnellerie, cette si belle lumière sur les vignes en fin de journée, les travaux qu’il aimait tant suivre pour l’orangerie et le nouveau chai…

J’ai mis beaucoup de temps à comprendre que mon père avait un vrai travail quand j'étais petit, car il était toujours si gai et si ravi d’aller à Margaux le matin et avait le même sourire en rentrant le soir, je me demandais bien ce qui pouvait le comblait autant de joie toute la journée. J’ai mieux compris plus tard son amour total pour cet endroit, pour son travail, sa passion du détail pour viser toujours plus d’excellence comme il le disait si bien. Quel bel exemple à suivre pour nous plus tard.

Nous souhaitons dire mille mercis à Béatrice pour avoir été si forte et si présente auprès de toi Papa pendant cette terrible maladie ces derniers mois.

Un grand message d’amour aussi a notre Maman Laurence qui a toujours été si aimante, si chaleureuse et a toujours su nous entourer dans les moments difficiles.

De tendres pensées pour ceux que nous avons bien connus et que tu es parti rejoindre: ton frère Bernard, tes parents Michel et Françoise, ils t’attendent les bras ouverts, avec autant d’amour à donner au Ciel que sur Terre.

Enfin, un grand merci à Arnaud, ton neveu médecin, qui a été si incroyable durant cette maladie.

Dans une prochaine vie, papa, j’aimerais te reprendre comme père.

And a short English version :

For all those of you here who do not speak French, thank you so much for being here for our father Paul. We really appreciate your warm presence and he would be so happy to see all of you today under such a beautiful sun in Bordeaux.

Paul was more than a father to us, he was our best friend, our mentor, a wonderful man filled with grace, love and dignity. I have never loved or admired someone so much in my life.

It just doesn’t make sense that he should be taken away now.

We will all miss his kindness, his warmth, his elegance, his smile and generosity, and the wonderful twinkle in his eye.

My best advice now for all of us is to think about such a rare and great man every time we will drink a glass of wine which, I am sure, will happen a lot.

Au revoir Papa. Life is definitely too short.

Corinne read this speech from her iPhone, having realised quite late in the day that a piece of paper might actually have been safer.

Paul,

Je me souviendrai toujours du premier jour où je vous ai rencontré, il y a 33 ans.

Je vous observais, avec stupéfaction, m'expliquer calmement que vous aviez toutes les qualités requises pour prendre rapidement les rênes de Château Margaux ... vous aviez 27 ans, et aucune expérience professionnelle.

C'est cette audace, accompagnée de quelques beaux diplômes, qui m'avait finalement séduite. Je n'avais moi-même qu'une trentaine d'années.

Comment imaginer alors le personnage que vous alliez devenir? Je ne reviendrai pas sur toutes vos grandes qualités, les multiples messages que nous recevons à Margaux depuis le début de cette semaine faisant l'unanimité. Je rajouterai une chose cependant: la grande expérience dont vous faisiez toujours preuve, votre sagesse en somme, comme si vous aviez vécu 1000 ans, comme si vous aviez exercé 1000 métiers. Chaque problème trouvait une solution grâce à vous, et, d'ailleurs, avec vous, il n'y avait jamais de problème.

Pendant 33 ans, nous avons tout partagé – mariage, divorce, remarriage et naissance de nos enfants – sans parler de notre intérêt commun pour les lettres, l'histoire, le monde que nous avions parcouru ensemble. Seuls nos goûts musicaux étaient largement opposés.

Je suis heureuse de vous avoir dit l'année dernière, spontanément, sans même y avoir réfléchi, que vous étiez un homme exceptionnel; j'entends encore votre réponse, modeste, comme d'habitude: ‘vous êtes gentille. Vous savez, je m'occupe de Margaux comme si j'en étais propriétaire.’

Voilà où se trouvait votre principale force: l'amour que vous aviez pour Margaux, un amour, une passion que je partageais aussi avec vous.

Je me souviens de chaque été en Grèce, lorsque vous m'appeliez, souvent, pour me donner des nouvelles de nos raisins; quelque étaient les conditions, chaque millésime s'annonçait comme un millésime exceptionnel. Pluie ou soleil, vous faisiez toujours preuve du même optimisme.

Aujourd'hui nous sommes là, tous les membres de l'équipe de Margaux, pour vous entourer et vous rendre un dernier hommage. Beaucoup d'entre eux ont une véritable vénération pour vous, y compris certains de nos retraités.

Je vais vous faire un reproche cependant, au bout de 33 ans, un seul reproche. Celui de m'avoir quittée, moi et tous les collaborateurs de notre équipe, de nous avoir laissés sur le bord de la route, écrasés par le chagrin et l'angoisse, la culpabilité aussi de ne pas avoir pu faire plus pour vous accompagner dans vos terribles souffrances.

Mais nous allons continuer et y arriver, parce que vous l'auriez voulu, parce que nous voulons être dignes de vous, et de tout ce que vous nous avez légué.

Vous allez rester comme le magicien de Château Margaux dans l'histoire, comme Mr Berlon l'avait été au xiii ème.

Adieu Paul, merci. Je vous admire et je vous aime.